Histoire du domaine seigneurial

Un lieu, une histoire…

Les vestiges du château de Boussu s’insèrent dans un parc naturel qui ne couvre lui-même qu’une partie du vaste domaine seigneurial. Au-delà de la ligne de chemin de fer installée dans les années 1840, le complexe castral était relié par une voie rectiligne à la chapelle funéraire des seigneurs sise à environ 200 m au sud de la voie ferrée. La Haine, supportant jadis une navigation sur son cours en tout ou en partie, coule au nord du site et dessine ici une plaine marécageuse qui conditionne l’essence du domaine et son histoire.

Le paysage, aujourd’hui largement ouvert, a évolué au fil des siècles… C’est sur un promontoire s’avançant vers les marécages et dominant la vallée que fut édifiée la forteresse médiévale, bien attestée par les sources écrites dès le 13e siècle. Pour les périodes plus anciennes, les découvertes éparses rapportées depuis le 19e siècle témoignent, si pas d’une occupation certaine, à tout le moins du passage d’une population du Néolithique (4200-2500 av. J.-C.) sur le territoire de Boussu ainsi que d’une activité protohistorique (800-57 av. J.-C.) au nord comme au sud de la Haine. Quelques objets gallo-romains ont été trouvés sur le site, dans ce qui pourrait être un niveau d’occupation de cette période ; d’autres, ramassés dans des remblais plus tardifs. Ces traces peuvent être mises en relation avec la proximité d’un hypothétique chemin secondaire croisant la Haine pour relier les chaussées romaines de Bavay-Asse et Bavay-Velzeke, dans une vallée qui semble alors accueillir différents types d’installation.

La forteresse de la famille de Hennin-Liétard

Propriété de la famille de Hennin-Liétard dès 1225, la place forte de Boussu est destinée à servir l’ambition et la gloire d’un homme puissant sous le règne de Charles Quint. Jean V commande la construction d’une demeure exceptionnelle amenant le démantèlement de l’ancienne forteresse ruinée en 1478 par un siège de l’armée française… Ces bâtiments ne seront pas pour autant entièrement démantelés puisque leurs fondations seront vraisemblablement récupérées, au moins partiellement, comme celles de l’ancien châtelet.

la premiere porte qui estoit au mesme endroit, avant l’erection du nouveau chasteau et laquelle est presentement abolie, la vieille bassecourt et ediffices aussy demolie, les jardins y tenans… (Cartulaire des fiefs de la terre et comté de Boussu renouvelé en l’an mil six cent neuf)

La forteresse médiévale est illustrée par deux gravures du début du XVIe siècle dont une copie un plan original de 1360. Au stade actuel de la recherche, lui sont attribués quelques rares vestiges archéologiques : deux sections d’une voie carrossable mise au jour dans la cour de la résidence seigneuriale et à l’avant du châtelet d’entrée, en plus de fondations et de murs arasés.

Portion de voie médiévale découverte en fouilles ©asbl Gy Seray Boussu
Tablette en bois de cerf. Scène de la Nativité ©asbl Gy Seray Boussu

Le château de la Renaissance

Reconstitution du château de Boussu (16e siècle)

Au printemps 1540, la construction d’un château en style renaissant est officiellement lancée à la demande de Jean V de Hennin-Liétard (1499-1562). Confiée au célèbre architecte hennuyer, Jacques Du Broeucq, celle-ci intervient dans un contexte florissant pour le seigneur de Boussu qui, durant les années 1530, acquiert titres, honneurs et charges étatiques qui lui octroient une place importante dans « la cour des grands ». Son union avec Anne de Bourgogne en 1532 aura contribué à cette ascension sociale. La demeure des deux époux portera dans ses pierres leurs devises respectives, Gy Seray Boussu et À jamais Bourgogne.

S’il semble que ce château digne d’un roi n’ait jamais été achevé, plusieurs campagnes de travaux ont été recensées, tenant alors du chantier de rénovation imposé, notamment, par les occupations militaires qui se sont succédées tout au long des 17 et 18e siècles, Boussu étant un point stratégique pour les garnisons, localisée entre Saint-Ghislain et Mons. D’autant qu’à toutes ces occasions, le domaine devient un refuge pour la population.
Des matériaux de construction sont liquidés au gré des évènements : ils se retrouvent à l’abbaye des Dunes à Koksijde, à la collégiale Sainte-Waudru à Mons ou encore à l’église d’Alost. Le désintérêt des propriétaires explique aussi en partie cet état de fait : le château étonne encore ses visiteurs mais il est le projet d’un autre siècle. Les comtes doivent souvent s’absenter et, au 18e siècle, Paris ou encore Florence deviennent leur ville de résidence. Les Hennin-Liétard gravitent  dans l’entourage de Marie-Antoinette ; Victor-Maurice de Riquet de Caraman, marié à la fille du comte de Boussu, imaginera le parc à l’anglaise, inspiré de la philosophie des Lumières, pour le jardin de Trianon.

Aquarelle de J. Pennier,1684

Sous la Révolution française, des prairies du domaine sont louées, des éléments architecturaux disparaissent… avant la mise sous séquestre en 1795 et la réalisation de travaux sur certains bâtiments de la seigneurie. La restitution du château de Boussu à ses propriétaires coïncide de peu avec la mort du dernier Hennin-Liétard comte de Boussu. Son neveu, Maurice-Gabriel de Riquet de Caraman, hérite de la seigneurie en 1805. Il sera le dernier comte de Boussu et marquera un tournant dans l’aménagement du site.

La Villa Caraman du 19e siècle

Dès 1810, des travaux de réaménagement poursuivent la transformation du châtelet et de la galerie en corps de logis et celle des abords en un parc romantique à l’anglaise… C’est sous cette forme que la porte d’entrée du château renaissant traversera les deux prochains siècles. La vente de parcelles à l’État belge et l’installation de la ligne ferroviaire Mons-Valenciennes, dans le cadre de liaison Bruxelles-Paris, participera à isoler le château du centre urbain. Le manoir, alors propriété du comte Eugène-Joseph de Nédonchel, fera l’objet de nouvelles transformations à l’initiative de son fils, Georges, dans les années 1875, date de l’édification des deux ailes en style néo-gothique à l’extrémité nord de la galerie. Cette résidence secondaire sera léguée par Caroline de Nédonchel au marquis Eugène de Chabannes qui en hérite en 1907 qui ne séjournera que sporadiquement au château, notamment pendant l’entre deux-guerres.

Villa Caraman (19e siècle)

Une explosion retentissante

Les occupations militaires allemandes successives signeront le déclin de ce château du 19e siècle qui conservait la mémoire de l’ancien châtelet de la Renaissance.  Le 2 septembre 1944, l’explosion de plusieurs casemates contenant des munitions détruit largement les bâtiments : les ailes occidentales du château et les apports du 19e siècle sont réduits à l’état de ruines.

Ruines de la Villa Caraman après l'explosion du 2 septembre 1944

Et après ?

De la recherche...

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#1988-2018

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